Les mois de septembre et d’octobre sont les mois de l’année qui connaissent naturellement pour la planète les plus faibles taux de concentration de CO2, en particulier à l’observatoire de Mauna Loa, à Hawaï. Pour la première fois, ils s’annoncent ici supérieurs en moyenne à 400 ppm.
Le 29 août 2016 est devenu un jour symbole à la station Mauna Loa de Hawaï, qui fait référence en ce qui concerne la mesure de la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone: c’est le seul jour de 2016 et le dernier de notre ère industrielle à avoir connu une concentration de CO2 inférieure à 400 parties par million (ppm), avec 399,86 ppm.
Ayant dépassé pour la première fois à Mauna Loa la barre de 400 ppm en moyenne journalière le 9 mai 2013, la concentration atmosphérique de CO2 a ensuite poursuivi son évolution selon la forme d’une sinusoïde, avec des minimums au début de l’automne (consécutifs à la phase de végétation sur les terres de l’hémisphère nord, les plus nombreuses) et des maximums au printemps (consécutifs à l’arrêt de la phase de végétation dans l’hémisphère nord), jusqu’à 409,44 ppm en moyenne journalière le 9 avril dernier et 407,7 ppm en moyenne mensuelle en mai.
Accélération record de la concentration de CO2
Aujourd’hui, cette sinusoïde est donc totalement au dessus de la barre de 400 ppm à l’observatoire hawaïen. En août, la concentration moyenne de CO2 y a été de 402,25 ppm, soit 3,32 ppm de plus qu’en août 2015. Selon l’évolution saisonnière, celles des mois de septembre et d’octobre devraient être moins élevées mais tout en restant au dessus des 400 ppm. Elles étaient respectivement de 397,63 ppm et de 398,29 ppm en 2015. Les valeurs moyennes enregistrées pour les deux premières semaines de septembre ont été de 400,97 ppm et de 401,33 ppm.
Ces concentrations illustrent en fait une accélération record de la concentration de CO2: plus de 3 ppm par an depuis deux ans (+3,05 ppm en 2015) contre plus ou moins 2 ppm par an depuis le début du XXIe siècle. Cette accélération est en partie attribuée au phénomène El Nino 2015-2016 qui a eu tendance -avec les sécheresses et inondations qu’il a provoqué- à affaiblir la capacité de stockage de CO2 des écosystèmes terrestres.
La concentration de CO2 pourra éventuellement commencer à baisser quand les émissions dues à l’homme auront été divisés par au moins deux
Problème: pour conserver une chance sur deux de limiter le réchauffement global à +2°C en 2100 depuis l’époque préindustrielle -ce qui revient à jouer à pile ou face- il convient de limiter la concentration de CO2 à 450 ppm, selon le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC). Or, l’inertie de ce phénomène est puissante: la concentration de CO2 dans l’atmosphère continuera à augmenter même quand les émissions dues à l’homme connaîtront un pic et commenceront à être réduites. Ellle pourra éventuellement commencer à baisser quand les émissions anthropiques seront inférieures à la capacité d’absorption des écosystèmes terrestres et des océans, c’est-à-dire quand elles auront été divisées par au moins deux… Et à la condition que les écosystèmes soient assez résilients pour tenir jusqu’à ce moment sans accroître leurs propres émissions de gaz à effet de serre.
En revanche, plus la vitesse de concentration augmente comme actuellement, plus le temps imparti pour parvenir à stabiliser le réchauffement à +2°C, se réduit comme peau de chagrin.
Avec les ambitions nationales actuelles de réduction des émissions (INDCs), fournies à l’occasion de la COP21 (1) et qui ne doivent être revues qu’en 2025, les 450 ppm de CO2 risquent bien ne plus être très loin à cette date. Avant notre ère industrielle, la barre des 300 ppm n’avait jamais été dépassée depuis au moins 800 000 ans.
(1) 21ème conférence des parties (pays) adhérant à la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques, qui s’est déroulée à Paris en décembre 2015.
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