A l’Observatoire Mauna Loa d’Hawaï, le printemps est la saison des records en matière de concentration atmosphérique de CO2. Ainsi, avec 403,26 ppm, le mois d’Avril 2015 a battu le précédent record de moyenne mensuelle qui avait été établi en mai 2014 (401,78 ppm). Ce nouveau record doit cependant être lui-même battu en mai. Et encore, heureusement que nos émissions de CO2 sont pour moitié absorbées par les océans et les écosystèmes terrestres… Mais pour combien de temps ?
La concentration de CO2 dans l’atmosphère a battu en ce mois d’avril 2015 son précédent record à l’Observatoire Mauna Loa, à Hawaï, référence en la matière. Il a atteint 403,26 parties par million (PPM) contre 401,78 ppm en mai 2014. Cependant, ce record doit être à nouveau battu ce mois-ci, le mois de mai marquant traditionnellement le maximum annuel de la concentration. En moyenne journalière, le record s’établit désormais à 404,84 ppm, niveau atteint le 13 avril.
Depuis le début 2015, tous les mois ont connu des moyennes supérieures à 400 ppm à l’exception de janvier (399,96 ppm). Suivant leurs trajectoires actuelles, les moyennes devraient repasser sous cette barre à partir du mois d’août et jusqu’à novembre inclus. A partir de décembre 2015, elles ne redescendront en revanche plus en dessous, sauf probablement en septembre 2016 où elles se devraient se retrouver entre 399 et 400 ppm.
Pour l’année 2015, la concentration moyenne de CO2 devrait se situer entre 400 et 401 ppm, voire au-dessus de 401 ppm
Augmentant actuellement de plus de 2 ppm par an, la concentration de CO2 évolue selon les saisons: les minimums sont atteints en fin d’été – début d’automne et les maximums au printemps, du fait de l’action des végétaux de l’hémisphère nord. La plus grande partie des continents se trouve en effet dans l’hémisphère nord et les écosystèmes terrestres pompent plus de CO2 en période de végétation. En données corrigées de ces variations saisonnières, la barre des 400 ppm a été franchie en mars.
Pour l’année 2015, la concentration moyenne de CO2 devrait se situer entre 400 et 401 ppm, voire au-dessus de 401 ppm. Elle était de l’ordre de 280 ppm à l’époque préindustrielle et a augmenté de manière exponentielle suite à l’utilisation des énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) pour l’industrialisation.
Si l’on ajoute l’action des autres gaz à effet de serre, notamment le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O), on arrive à une concentration de l’ordre de plus de 480 ppm équivalent CO2 (478 ppm en 2013 selon l’index des gaz à effet de serre de l’agence américaine NOA, National Oceanic and Atmospheric Administration). Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il faut viser une concentration de 480 à 530 ppm équivalent CO2 à l’horizon 2100 si l’on veut conserver des chances de limiter le réchauffement global à + 2°c depuis l’époque préindustrielle, ce qui impose de décarboner l’économie d’ici quelques dizaines d’années.
Si la Terre ne nous protégeait pas avec ses puits de carbone, l’accumulation de CO2 aurait provoqué une concentration de gaz à effet de serre déjà largement supérieure à 600 ppm équivalent CO2
Notre chance, c’est que pour l’instant les écosystèmes terrestres et les océans font office de puits de carbone en captant environ la moitié des émissions humaines annuelles de CO2. Entre 1870 et 2013, l’humanité a émis selon Global Carbon Project environ 390 milliards de tonnes de carbone issu des énergies fossiles et de la fabrication du ciment, et 145 milliards de tonnes de carbone issu de changements d’affectation des sols. Elle a donc été à l’origine d’émissions de CO2 représentant 535 milliards de tonnes de carbone. L’océan et les terres en ont respectivement capté 150 et 155 milliards de tonnes tandis que 225 milliards de tonnes ont été stockés dans l’atmosphère. Imaginez si la Terre ne nous avait pas ainsi protégés ! A elle seule, l’accumulation de CO2 provoquerait une concentration de gaz à effet de serre déjà largement supérieure à 600 ppm équivalent CO2…
Mieux encore: jusqu’alors, plus on a émis de CO2, plus l’océan et les écosystèmes terrestres en ont capté. Leur capacité de stockage se montre donc élastique. Mais chacun sait que si on tire trop sur un élastique, il casse. Au fur et à mesure où le réchauffement global gagnera du terrain, la capacité d’absorption de ces puits naturels va se réduire. La limite des +2°C, c’est donc un peu la limite suspectée de l’élasticité de la Terre, même si cette limite peut en fait très bien être inférieure…
Ainsi, au dessus d’un certain seuil de chaleur et/ou de sécheresse, les écosystèmes terrestres sont en mesure, du fait par exemple d’une mortalité croissante de végétaux, de devenir des sources nettes de dioxyde de carbone. La fonte des sols du Grand Nord, le permafrost, sera quant à elle source d’émissions de carbone issu d’un méthane qui est jusqu’alors bloqué sous forme d’hydrate de méthane (ou clathratre) dans des terres gelées depuis des lustres. Le réchauffement de zones sous-marines peut également déstabiliser des stocks d’hydrate de méthane qui se sont eux formés au niveau des marges continentales. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime que l’océan contient entre 2000 et 8000 milliards de tonnes de CH4 sous forme d’hydrate.
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