Bilan annuel OMM des gaz à effet de serre: accélération de la concentration de CO2, puits à carbone affaiblis, océans acidifiés…

En plus de nouveaux records de concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre, le bulletin annuel de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) apporte trois mauvaises nouvelles: 1- L’augmentation de la concentration du dioxyde de carbone a connu une accélération supplémentaire en 2013. 2- Celle-ci pourrait être due à la “réduction des quantités de CO2 absorbées par la biosphère terrestre”. 3- Cette surcharge en gaz carbonique acidifie les océans à un rythme qui semble “sans précédent depuis au moins 300 millions d’années”.

Graphique très révélateur publié dans le bulletin annuel de l'Organisation météorologique mondiale. Il montre notamment (courbe en noir) notre trajectoire actuelle et l'effort à faire pour atteindre une concentration de gaz à effet de serre de 450 ppm en fin de 21e siècle si l'on ne veut pas dépasser, d'après les travaux du GIEC, 2°C d'augmentation globale depuis l'ère préindustrielle. Doc. OMM.

Graphique très révélateur publié dans le bulletin annuel de l’Organisation météorologique mondiale. Il montre notamment (courbe en noir) notre trajectoire actuelle et l’effort à faire pour atteindre une concentration de gaz à effet de serre (GES) de 450 ppm en fin de 21e siècle si l’on ne veut pas dépasser, d’après les travaux du GIEC, 2°C d’augmentation globale depuis l’ère préindustrielle. Ce graphique confirme par ailleurs que, tout GES compris, nous nous approchons dès à présent d’une concentration de 500 ppm équivalent CO2.  Doc. OMM.

La concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère a de nouveau atteint des records en 2013, comme le montre le bulletin annuel de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Concentrations respectives dans l’atmosphère de dioxyde de carbone (CO2), de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O): 396 ppm (1), 1824 ppb (2) et 325,9 ppb, soit 142 %, 253 % et 121 % de ce qu’elles représentaient à l’époque préindustrielle.

Une concentration de CO2 dont le taux d’augmentation a environ doublé en un quart de siècle

Si ces records ne sont pas une réelle surprise, une mauvaise nouvelle est l’accélération croissante de la concentration de CO2. En un an, cette concentration a en effet augmenté de 2,9 ppm selon l’OMM, ce qui représente là encore un record. Au Maona Loa Observatory, à Hawaï, elle a par exemple atteint 396,48 ppm contre 393, 82 ppm en 2012, soit une hausse de 2,66 ppm alors que pour la période 2004 – 2013 le taux moyen d’augmentation n’y est “que” de l’ordre de 2,07 ppm. Pour comparaison, ce taux était de 1,4 ppm pour la période 1984-1993 et 1,34 ppm dans la décennie antérieure, c’est-à-dire environ deux fois moins qu’en 2013.

Deuxième mauvaise nouvelle : des “données préliminaires” laissent supposer que cette accélération “pourrait être dû à la réduction des quantités de CO2 absorbées par la biosphère terrestre alors que les émissions de ce gaz continuent de croître”, assure l’OMM. Dit autrement, soit les puits à carbone que sont les écosystèmes terrestres et océans ont été moins efficaces qu’habituellement (ce qui est à terme envisagé dans le processus du réchauffement global), soit il y a eu des émissions naturelles supplémentaires (par exemple par rétroaction au réchauffement anthropique).

La concentration de méthane est elle aussi repartie à la hausse depuis 2007

Si le rythme d’accroissement actuel se maintient, l’OMM confirme que la teneur annuelle moyenne de l’atmosphère en CO2 à l’échelle du globe dépassera la barre des 400 ppm en 2015, sinon 2016.

Concernant toujours l’accroissement de la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, on sait également que le GIEC (Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a noté dans la 1ère partie de son dernier rapport, fin 2013, qu’après un palier au début des années 2000, la concentration atmosphérique de méthane est nettement repartie à la hausse depuis 2007, ce que valide encore l’OMM, sachant en plus que les réactions chimiques du CH4 dans l’atmosphère font apparaître d’autres gaz à effet de serre: CO2, ozone (O3), vapeur d’eau.

« Plaider l’ignorance ne peut plus être une excuse pour ne pas agir » (Michel Jarraud, OMM)

«Nous devons inverser cette tendance en réduisant les émissions de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans tous les domaines d’activité. Le temps joue contre nous », a commenté le Secrétaire général de l’OMM, Michel Jarraud. « L’effet cumulé des émissions passées, présentes et futures de ce gaz se répercutera à la fois sur le réchauffement du climat et sur l’acidification des océans. Les lois de la physique ne sont pas négociables », a-t-il complété.

Pour lui, ce bulletin de l’OMM sur les gaz à effet de serre « fournit aux décideurs des éléments scientifiques sur lesquels ils peuvent s’appuyer. Nous possédons les connaissances et nous disposons des leviers nécessaires pour prendre des mesures visant à limiter à 2°C l’augmentation de la température et donner ainsi une chance à notre planète tout en préservant l’avenir des générations futures. Plaider l’ignorance ne peut plus être une excuse pour ne pas agir », a-t-il averti.

Océans: « le processus d’acidification continuera de s’accélérer au moins jusqu’au milieu du siècle »

Outre les concentrations des gaz à effet de serre, l’OMM développe dans son bilan la question de l’acidification des océans provoquée par la surcharge de CO2. “L’océan absorbe aujourd’hui le quart des émissions anthropiques de CO2, limitant ainsi l’accroissement du CO2 atmosphérique causé par l’exploitation des combustibles fossiles. L’absorption de quantités accrues de ce gaz par les mers du globe modifie le cycle des carbonates marins et entraîne une acidification de l’eau de mer”, explique l’OMM. Celle-ci est déjà mesurable: les océans absorbent environ 4kg de CO2 par jour et par personne.

Troisième mauvaise nouvelle: “Le rythme actuel d’acidification des océans semble sans précédent depuis au moins 300 millions d’années, si l’on en croit les données indirectes livrées par les paléo-archives. Le processus d’acidification continuera de s’accélérer au moins jusqu’au milieu du siècle, d’après les projections établies à l’aide de modèles du système terrestre”, prévient également l’Organisation météorologique mondiale..

“Les conséquences que l’acidification des océans peut avoir pour les organismes marins sont complexes. La réaction des organismes calcifiants tels que les coraux, les algues, les mollusques et certains planctons est une grande source d’inquiétude vu que leur aptitude à former leur coquille ou leur exosquelette (via la calcification) dépend de la quantité d’ions carbonates. Pour beaucoup d’entre eux, l’augmentation de l’acidité a une influence néfaste sur la calcification”, craint-elle. Autres conséquences de l’acidification sur les organismes marins: la réduction de leurs taux de survie et de développement, l’altération de leurs fonctions physiologiques et une diminution de la biodiversité.

(1) ppm: parties par million

(2) ppb: parties par milliard

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